Il était mort depuis longtemps...Michael Jackson

Publié le par Jean-Guy



Voici un article intéressant de Marc Cassivi du journal La Presse

Cet article m'apparait véridique.

Une critique dure et sévère à l'endroit de Michael Jackson...

mais aussi des plus réaliste.

Je vous invite à la lire



Il était mort depuis longtemps, Michael Jackson. Mort artistiquement, dans la foulée du succès foudroyant de Thriller. Mort pour les hommes, desquels il n'avait cessé de se distancier.

Un mort en sursis, plus déjà qu'un souvenir, une curiosité malsaine. Mis au ban pour ses comportements sexuels ambigus, dénoncé pour ses excentricités, confiné au rôle de bête de cirque médiatique. Créature blessée, recluse et défigurée, en faillite humaine et financière. Mort triste d'une vie triste.

Et pourtant. Il était magnifique et lumineux, l'enfant fragile au talent prodigieux des Jackson Five, chantant de sa voix cristalline I Want You Back. Off The Wall fut l'album brillant du prétendant au trône. Thriller, le disque de la consécration planétaire, sacre du «Roi de la pop», porte-étendard d'un nouveau modèle économique croisé: chanteur-danseur-acteur surdoué d'époustouflants vidéoclips.

The King of Pop. Le titre royal qu'il portait fièrement, comme une ceinture de champion de boxe, lui avait déjà glissé des mains au moment où il s'en est le plus enorgueilli, au milieu des années 90. Roi déchu s'accrochant à sa marque de commerce comme un naufragé à une bouée de sauvetage.

Dès Bad, en 1987, Michael Jackson est devenu, à l'instar de son personnage de dessin animé à la télé, une caricature de lui-même. On se moquait à l'époque de l'image de dur qu'il tentait en vain de projeter. «Weird Al» Yankovic a parodié avec maestria le clip de gang de sous-sol de Bad (filmé par Scorsese). Eddie Murphy s'est acharné en spectacle sur ce «gars qui sait chanter mais n'est pas le type le plus masculin au monde» («Tito, give some tissue! Jermaine, stop teasing!»).

Certains, séduits par l'hybridation des genres de Thriller (rock, pop, r&b), ont peu à peu délaissé l'artiste, estimant avec raison qu'il ne se renouvelait plus musicalement et que son personnage médiatique («Wacko Jacko», Jacko le barjo) avait pris le pas sur son oeuvre. Des dizaines de millions d'inconditionnels lui sont restés fidèles jusqu'à Dangerous (pourtant médiocre), mais à la sortie du pompeux HIStory (amalgame de «l'Histoire» et de «son histoire»), en 1995, succombant à son propre mythe, le souverain mégalo avait perdu son royaume.

Je suis de la génération qui a découvert la musique pop grâce à Michael Jackson. J'avais 9 ans à la parution de Thriller, mon premier album. C'est le seul 33-tours que j'ai conservé à ce jour, par pure nostalgie, après l'avoir écouté jusqu'à plus soif. Pourtant, la mort de Michael Jackson, jeudi, ne m'a pas le moindrement ému ni surpris. Peut-être parce que j'ai fait, il y a longtemps, le deuil de mon idole d'enfance.

Michael Jackson, l'artiste, n'était plus pertinent depuis au moins 20 ans. Restait ce zombie désolant, ce cobaye de la médecine moderne, cette loque humaine vidée de toute vitalité. Un ermite en cavale, à la fois conspué, idolâtré et traqué par les sangsues de l'information-spectacle, internautes-potineurs et autres reporters-vampires de l'impudeur et de l'impertinence.

Le visage navrant, squelettique, diaphane de Michael Jackson était, en fin de vie, à l'image de son époque. Triste. Sinistre. Le résultat d'une enfance dans le show-business, marchandée par son père tyrannique. Celui de sa transformation, à l'âge adulte, en bien de consommation mondialisé, dans l'air du temps, que l'on s'est arraché de la Terre de Feu à la Sibérie, avant de le jeter dans le caniveau, comme une vieille canette de Pepsi.

Il y avait de quoi virer fou.


Lien: http://www.cyberpresse.ca/opinions/chroniqueurs/marc-cassivi/200906/26/01-879315-il-etait-mort-depuis-longtemps.php



 

Publié dans Textes de Jean-Guy

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